L’inflation est de retour, les taux d’intérêt remontent, les actions sont fortement valorisées et en Asie, les marchés financiers grincent. Une méga-faillite immobilière ne choque pas seulement l’économie chinoise. En effet les marchés boursiers deviennent nerveux et craignent une réaction en chaîne. Quatre raisons expliquent l’imminence d’un krach boursier 2021 ou en 2022? Voici quelques éléments à prendre en compte.
Risque de krach : le tournant des taux d’intérêt sera un brise-lames pour les marchés boursiers
Premièrement, le tournant des taux d’intérêt est là. Pendant des années, les marchés boursiers et immobiliers ont profité de taux d’intérêt extrêmement bas grâce à l’argent ultra bon marché de la banque centrale. Cela est en train de changer. L’expérience montre toutefois que de tels revirements des taux d’intérêt agissent comme des brise-lames brutaux pour les marchés boursiers. Le simple fait d’anticiper une hausse des taux d’intérêt fait chuter les cours. En 2018, on en a eu un avant-goût : le taux d’intérêt à dix ans aux États-Unis est passé en peu de temps de 1,6 à 3,2 pour cent. Par la suite, le cours des actions a chuté de plus de 20 pour cent. Ou encore en 2013, lorsque Ben Bernanke, alors président de la Fed, a provoqué une véritable panique sur le marché en annonçant son intention de réduire les achats d’obligations de la banque centrale.
Actuellement, ce sont surtout les chiffres élevés de l’inflation qui font que le tournant des taux d’intérêt se fait sentir. Les investisseurs en actions devraient se préparer à des difficultés si le taux d’inflation se maintient à moyen terme au niveau élevé actuel et si la Fed avance pour cette raison les premières hausses de taux à la mi-2022. En septembre, le taux d’inflation en France a atteint 2.1%. Ce n’est pas beaucoup moins dans la zone euro : les prix à la consommation y ont augmenté de 3,4 pour cent en septembre par rapport à l’année précédente, la valeur la plus élevée depuis 13 ans. Et aux États-Unis, le taux d’inflation est même de 5,3 pour cent. Le retournement des taux d’intérêt devient donc aigu, le risque pour les actions et les marchés immobiliers augmente rapidement.
La conjoncture spéciale est terminée.
Deuxièmement, les grandes économies nationales s’affaiblissent. Après la conjoncture spéciale de rattrapage consécutive à la crise Corona, la croissance en Chine, en Europe et aux États-Unis reste en deçà des attentes. La France n’annonce qu’une croissance de 1,1 pour cent pour le deuxième trimestre, l’Allemagne une croissance de 1,6 pour cent. Le climat économique s’assombrit en Europe, comme le montre l’indice ZEW. Les prévisions conjoncturelles ne sont guère mieux: Le baromètre du moral a chuté de 13,9 points par rapport au mois précédent, passant à 26,5 points. En mai, l’indicateur avait encore atteint son plus haut niveau depuis deux bonnes décennies. Depuis, il baisse mois après mois. « La pénurie de puces dans la construction automobile et la raréfaction des ressources dans le secteur de la construction ont entraîné un net recul des prévisions de rendement de ces branches », a expliqué le président du ZEW.
En Chine aussi, on observe de nettes traces de freinage. En août, l’indice des directeurs d’achat a chuté à des valeurs qui signalent la fin de la conjoncture spéciale suite au rattrapage Corona. En septembre, les ventes au détail ont chuté à 2,5 % par rapport à l’année précédente. Les économistes s’attendaient à un taux d’environ 7 %. La croissance de la production industrielle est également restée en deçà des attentes. Aux États-Unis, le tableau est le même : la conjoncture perd de son dynamisme selon la banque centrale (Fed). On constate désormais un « rythme de croissance modéré ». La confiance des consommateurs a déjà atteint son niveau le plus bas depuis 2011. Dans l’ensemble, les investisseurs en actions n’ont donc plus l’imagination pour de nouveaux sauts de croissance. La tendance à prendre des bénéfices augmente.
En 150 ans, les actions n’ont été plus chères que cinq fois.
Troisièmement, les actions sont relativement chères. Ainsi, l’indice Nasdaq des valeurs technologiques a doublé en un an et demi, passant de 7 000 à plus de 14 000 points. Même l’indice MSCI World a bondi de 1600 à plus de 3000 points. Après un boom d’un an et demi de dépassement de la couronne, le temps d’une correction pourrait être venu. En Asie, les bourses sont orientées à la baisse depuis quelques semaines déjà.
Si l’on examine de plus près les évaluations fondamentales du S&P 500, on constate que les actions sont actuellement très bien valorisées. Au cours des 150 dernières années, le ratio cours/bénéfices n’a que très rarement (cinq fois) dépassé et maintenu cette barre.
Une autre source d’inquiétude est ce que l’on appelle la « margin debt« . Celle-ci décrit la somme d’argent que les investisseurs empruntent contre intérêts pour acheter des titres. Cette valeur s’envole depuis un an et demi – de 50 à 70 pour cent. Au cours du dernier quart de siècle, cela ne s’est produit que trois fois :
- Juste avant l’éclatement de la bulle dot-com,
- juste avant la crise financière
- maintenant.
Les banques et les courtiers américains ont accordé à leurs clients des crédits d’un montant de plus de 910 milliards de dollars à la fin du mois d’août, soit une augmentation de 8 pour cent par rapport au mois précédent, poursuivant ainsi la hausse extrême qui dure depuis un an, comme le montrent les données de l’autorité de surveillance des titres FINRA. Cela signifie que près d’un billion de dollars de crédits sur titres sont actuellement émis – avec un risque élevé correspondant de ventes d’urgence imminentes.